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Et de nombreux concepts éclairants qui vous feront prendre du recul, ou faire un pas de côté.
Trouver sa juste place, ça peut être un long chemin à parcourir.
En tant qu'individu, et en tant qu'organisation, trouver ce que nous avons de plus important à dire et à partager avec le reste du monde peut s'avérer plus complexe qu'il n'y paraît.
Savoir se poser les bonnes questions, aller en profondeur demande du temps, une part de courage mais aussi de savoir-faire.
Ce savoir-faire, nous l'avons développé et mis en œuvre pour d'autres, nous pouvons aussi le faire pour vous.
A l'occasion d'un premier rendez-vous sans engagement par téléphone ou en visio, faisons connaissance et voyons si nous pouvons, ensemble, cheminer vers le changement qui vous tient à cœur.
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Pierre Gérard
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19/09/2025
Jean-Paul Delevoye, président du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) intervenait lors du colloque « Reconstruire la confiance » organisé à l’Ecole Militaire à Paris par l’Institut Confiances.
Une intervention d’une densité et d’une intensité rares.
« La confiance est un facteur de compétitivité. Un système qui se construit sur la méfiance est un système en perte de compétitivité. C’est le cas aujourd’hui où l’on se méfie de tout. Plus fondamentalement, nous ne sommes pas en crise, nous sommes en métamorphose. C’est la troisième fois dans l’histoire de l’humanité que nous avons la conjonction entre un mode d’énergie nouveau et un mode de communication nouveau. Il en sortira une société fondamentalement différente. Quand vous êtes en métamorphose, il se passe vingt à vingt cinq années de grandes douleurs. Les crispations et les résistances sont d’autant plus amplifiées que le progrès apparaît comme un facteur de risques et non plus comme un facteur porteur d’opportunités. »
« Nous vivons aujourd’hui trois chocs, trois défis.
Le premier est le choc territorial. Il concerne la localisation des ressources et la production de valeur ajoutée. Selon la capacité d’attractivité d’un territoire, un phénomène de confiance collective se mettra en place ou non. Aujourd’hui, les Européens ont la perception de sortir du radar économique du monde.
Le deuxième choc est générationnel. Le vieillissement est en train de bloquer le transfert inter-générations. Une méfiance s’installe. La réforme des retraites m’a semblée moins importante par les résultats que par les évolutions suscitées dans l’opinion. Pour les plus des 65 ans, 75% de leur retraite viendra du transfert des actifs vers eux. Les plus jeunes pensent que seul 25% de leur retraite future sera composée de ces transferts. On quitte alors une adhésion à des causes communes pour aller sur une défense d’intérêts. Au final, quand la cause semble nourrir des intérêts, on se replie sur ces derniers et l’on se déchire.
Le troisième choc est identitaire. Nous sommes dans le siècle de la mobilité qui sera aussi celui de l’altérité. Du fait de sa démographie, l’Europe va devoir intégrer cinquante millions de population étrangère d’ici 2050 pour assumer le fonctionnement de son économie et équilibrer sa population active. La question de l’identité sera au cœur de tous les sujets car il va falloir les intégrer. Si, vous-même, vous êtes dans une identité faible, l’intégration se fera dans le conflit. Si vous êtes dans une identité forte, la construction se fera en connaissance de cause en sachant ce qui peut être laissé et ce qui peut être gagné.
En France, on a confondu identité et uniformité. Contrairement à l’Allemagne, le pouvoir central n’a eu de cesse de considérer que l’émergence d’identités régionales était un facteur d’affaiblissement. Construire l’identité est un enjeu déterminant. Quand on valorise la différence, on construit les individus. Cela touche notre capacité à vivre avec l’autre. Regardez comment des systèmes politiques instrumentalisent les identités alors que des systèmes économiques comme des entreprises réussissent à les transcender. »
« En France, comme le montrent les sondages, payer l’alimentation et l’essence sont devenues une préoccupation principale du quotidien. On ne défend les valeurs de la République que quand on a le ventre plein. En 2012, les personnes déclarent que le moyen pour elles de s’en tirer est de trouver des combines. Quand on n’a plus confiance, on va chercher dans l’économie parallèle. Ce n’est pas une perte, mais un transfert de confiance. Oui, nous sommes concurrencés par ces systèmes parallèles. »
« Lorsque j’étais médiateur de la République, je parlais de la notion de burn-out. On n’est pas fatigué physiquement, on est fatigué psychiquement. La France a cette capacité d’user les cerveaux. Au travail, lorsque vous quittez le bureau à 18 heures, il est considéré que vous n’en faites pas lourd. Il faut rester jusqu’à 20 heures. Au Canada, celui qui part après 17 heures est quelqu’un de mal organisé. Le matin, le mot au départ du domicile y est « enjoy », alors qu’en France, on dit « bon courage ». Cette angoisse individuelle est en train de basculer vers une inquiétude collective. Elle est en train de tuer l’initiative. En 2013, pour la première fois, les 25-34 ans ne se considèrent plus comme faisant partie de ceux qui contribuent à rendre la société plus dynamique, plus innovante. C’est paradoxal de constater ce pessimisme ambiant alors que la France est le cinquième pays au monde le plus utilisateur d’économie numérique. »
« On constate des mouvements économiques d’amplitudes extrêmement fortes. Un acteur qui semblait très puissant se révèle tout à coup fragile. La société est déboussolée. Elle a l’impression que ses dirigeants n’ont plus la maîtrise du système. Les sentiments deviennent alors des ressentiments. Pour se stabiliser l’opinion a besoin de s’accrocher à une parole incontestable, d’où l’importance de l’aspect moral de la parole publique. Or, cette dernière a refusé la réalité durant 40 ans. Le taux de croissance était affiché comme un taux d’espérance. Ce mensonge était marchand d’illusion d’autant que nous sommes rentrés dans un cycle de taux de croissance relativement faible.
« Nous sommes au bout d’un système fondé sur l’acquisition matérielle. Comment être heureux en ayant moins ? La nouvelle génération ne pourra plus acquérir, elle ne pourra que partager. Or le partage nécessite confiance. La société du bien va devoir évoluer vers la société du lien. De même, la société de la performance va devoir glisser vers la société de l’épanouissement. L’important sera d’exister dans l’immatérialité. L’homme économique est mondial. En revanche, l’homme social est local. Si un nouveau pacte de vitalité sociale se développe, la force des individus va nourrir la dynamique locale et nationale. C’est un choc culturel auquel j’aspire. »
« La force de la France est l’innovation et la créativité. Or tout notre système est à contre courant de ce qui fait notre force. T’échoue à l’école, t’es nul. Ta femme t’a quitté, t’es nul. T’a pas de Rolex, t’es nul. Une tête bien faite est bien plus importante qu’une tête bien pleine. L’important est d’éveiller le sens critique de nos enfants. On doit arrêter de demander aux professeurs de respecter davantage les programmes que les élèves. De même, le management n’est plus à la supériorité, mais à la responsabilité. On doit être au cœur des équipes en acceptant un droit à l’erreur. »
« Aujourd’hui, notre système triche pour préserver le confort du système et non pour s’adapter au confort du client. Concrètement, les mouvements d’adaptation se font en dehors de nos organisations. Ceux qui ont la trouille, ce sont les gens du système. Car ils pensent que le futur doit s’adapter à leur système, alors que c’est le contraire. Nos décideurs vont-ils réussir à nourrir des micro-systèmes d’auto-destruction afin de faire émerger des solutions nouvelles ? C’est ce qu’IBM a fait lorsqu’elle a décidé de ne plus être un constructeur d’ordinateur. La Nasa a fait de même après l’accident de la navette Challenger. Une grande vitalité en a résulté. »
« Lorsque je suis arrivé au Conseil Economique Social et Environnemental, j’ai demandé à ce que cet endroit réponde à trois objectifs. J’ai voulu qu’il soit la maison du futur, la maison du temps long, car la dictature du court-terme tue la vision. J’ai demandé qu’elle soit la maison du dialogue afin de sortir du « si je tape sur quelqu’un, j’existe ». Enfin, j’ai souhaité, et c’est le plus compliqué, qu’elle devienne la maison des citoyens. Les citoyens veulent être les co-producteurs du futur. Ils veulent être associés. Ils veulent qu’on leur rende compte. Une élection peut créer un leurre de légitimité. »
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